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mercredi 14 mars 2012


Majoration de 30 % des droits à construire : les quatre conditions requises

Sur un même terrain, vous allez bientôt pouvoir construire 30 % de surface en plus, et cela pendant trois ans.


Annoncée par le Président de la République le 29 janvier, la loi permettant la majoration des droits à construire a été adoptée définitivement mardi par les parlementaires. L'objectif poursuivi par le gouvernement est d'augmenter l'offre de logements en majorant de 30 % les possibilités de construire sur un terrain donné. Et cela sans peser sur les finances publiques. Ici, en effet, à la différence du dispositif Scellier appelé à disparaître le 1er janvier 2013, pas de réduction d'impôts à la clef.
Le gouvernement table sur la construction de 20.000 à 40.000 logements supplémentaires par an. La mesure est cependant transitoire et ne vaut que pour trois ans. Elle concerne uniquement les permis de construire ou les déclarations déposées avant le 1er janvier 2016.

Elle peut intéresser les promoteurs et les particuliers, dans le neuf comme dans l'ancien, à condition qu'il s'agisse de locaux d'habitation. Mais attention, construire 30 % de plus n'est pas un long fleuve tranquille. Il faut avant d'obtenir ce sésame passer par un certain nombre d'étapes et répondre à toute une série de conditions détaillées ci-dessous.
Trois exemples
COS. Sur un terrain de 1.000 m², dont le règlement prévoit un COS (coefficient d'occupation des sols) maximal de 0,6, on peut construire jusqu'à 1.000 m² x 0,6 = 600 m². La majoration de 30 % porte la constructibilité à 780 m² (1.000 m² x 0,6 x 1,3). Emprise au sol. Sur un terrain de 200 m², sur lequel le règlement prévoit une emprise au sol maximum autorisée de 40 %, on peut construire un logement dont l'emprise sera au maximum de 200 x 40 % = 80 m². Avec la majoration de 30 %, l'emprise au sol pourra être de 104 m². Hauteur maximale. Dans une zone pavillonnaire, le plan local d'urbanisme (PLU) fixe la hauteur maximale autorisée à 9 mètres. Une augmentation de 30 % porte la hauteur maximale à 11,7 m. Si la hauteur est exprimée par rapport aux constructions voisines, la majoration s'appliquera sous réserve du respect de cette disposition.

La commune ne doit pas s'y opposer

Le dispositif n'est pas si novateur qu'il y paraît. Certaines possibilités de majoration des droits à construire existent déjà, et notamment celle de 20 %, jusque-là très peu utilisée par les communes.
Dans une étude réalisée sur 71 départements, « quasiment aucune collectivité n'a choisi d'utiliser ces dispositions », a rappelé le secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu, lors des débats parlementaires. Pour éviter un nouveau fiasco et tenter de renverser la tendance, plutôt que de demander aux communes de voter la majoration, comme cela a été le cas jusqu'ici, la hausse de 30 % des droits à construire s'appliquera automatiquement, neuf mois après la promulgation de la loi (attendue dans les prochains jours), sauf si la commune s'y oppose formellement.
Tous les territoires disposant d'un plan local d'urbanisme (PLU) ou d'un document équivalent (POS ou PAZ) sont concernés, ce qui représente « 17.000 communes sur 36.000, mais 80 % de la population »,selon Benoist Apparu. La question ne se pose pas pour les communes non couvertes par de tels documents, car s'applique alors la carte communale ou le règlement national d'urbanisme, bien moins contraignants et l'on peut alors « construire ce que l'on veut dès lors que le terrain est constructible », a encore précisé Benoist Apparu au cours des débats.

Le calendrier
La loi relative à la majoration de 30 % des droits à construire a été définitivement adoptée le 6 mars. Le groupe socialiste a confirmé aux « Echos » qu'il n'envisage pas de recours auprès du Conseil constitutionnel. Le gouvernement dispose désormais de quinze jours pour promulguer la loi et la rendre applicable. Le texte prévoit une procédure de consultation du public. En tout état de cause, et en l'absence de refus express de la commune, la majoration de 30 % des droits à construire s'appliquera automatiquement. En avril au plus tôt Dans une commune motivée, qui engagerait la procédure de consultation du public au plus vite, la mesure pourrait entrer en vigueur dès fin avril ou début mai, selon le temps pris par le gouvernement pour promulguer la loi (quinze jours au maximum après l'adoption). Voici les différents délais : huit jours pour informer le public des modalités de la consultation, les habitants disposent ensuite d'un mois pour formuler leurs observations, la majoration est effectivement applicable huit jours après la séance de présentation de la consultation publique à l'autorité compétente de la commune. En décembre au plus tard Sauf refus express de la commune, la majoration s'applique automatiquement dans les neuf mois à compter de la promulgation de la loi. Le gouvernement a jusqu'au 21 mars pour la promulguer, soit une entrée en vigueur automatique le 21 décembre au plus tard. S'il promulgue aujourd'hui, vendredi 9 mars, la loi s'appliquera alors au plus tard le 9 décembre.

Le respect des autres règles d'urbanisme...

« Il ne s'agit en aucun cas de rendre constructibles des zones qui ne le sont pas, mais d'augmenter les droits à construire dans les zones où c'est déjà possible », explique Stéphanie Le Beuze, fondatrice de Terra in Design, une société de conseil en optimisation foncière. Les droits supplémentaires ne peuvent en effet pas aller à l'encontre de toute une série de règles existantes.
En clair, ils ne s'appliquent pas dans les zones les plus exposées au bruit autour des aéroports, ni dans les zones inondables, ni dans les secteurs sauvegardés comme le quartier du Marais à Paris, celui du bouchon de Champagne à Troyes ou de la Grande Ile à Strasbourg, le centre historique de La Rochelle, le Vieux Lyon, le Vieux Nice, la cité Vauban de Briançon, le centre historique d'Avignon, etc.
La nouvelle loi ne permet pas non plus de modifier des règles édictées par une servitude d'utilité publique, notamment en matière de risques (le passage pour les pompiers par exemple) ou de protection du patrimoine (si vous êtes à côté du Panthéon, il faudra respecter les règles afférentes).
Ne peuvent pas non plus être remises en cause par ce texte les lois concernant la préservation du littoral (interdiction de construire dans une bande de 100 m à compter de la mer ou de la marée haute, etc.) ou de la montagne.
Enfin, les règles habituelles édictées dans les documents d'urbanisme (plan local d'urbanisme, etc.) devront également être respectées (hauteur, alignement, distance minimale entre l'habitation et la voie publique...).

Quels sont les agrandissements possibles ?
La majoration de 30 % vise à encourager la construction de logements neufs, mais également l'agrandissement des logements existants. En largeur et en hauteur Elle vaut tant pour le gabarit, l'emprise au sol, la hauteur ou le coefficient d'occupation au sol (COS) du bâtiment. Il peut donc s'agir d'agrandir une maison existante, soit en lui ajoutant un étage, soit en élargissant sa base, soit en construisant une annexe dans le jardin. Pour les appartements, c'est un peu plus compliqué. Individuellement chaque propriétaire peut éventuellement fermer ses loggias ou balcons pour en faire des pièces à vivre, mais guère davantage. « Je viens aussi de découvrir un procédé nouveau, parfois proposé en cas de rénovation énergétique : les échafaudages sont laissés sur place après les travaux et sont utilisés comme « structure » pour réaliser une ... extension du logement », explique, très sérieusement, Bruno Dhont, directeur de l'association des responsables de copropriété (ARC).Utiliser les espaces verts Les copropriétaires peuvent aussi décider de surélever le bâtiment d'un étage ou utiliser les espaces verts pour vendre des parcelles constructibles. « Certaines des copropriétés adhérentes à l'ARC y pensent, le fruit de la vente pouvant les aider à financer les gros travaux de rénovation énergétique », note Bruno Dhont. Attention cependant aux règles de vote dans les copropriétés, l'approbation n'est pas facile à obtenir...

... et celles des habitations « collectives »

« Dans les copropriétés, dans les lotissements (chacun construit la maison qu'il veut avec le constructeur qu'il veut), ou dans les groupements d'habitation (toutes les maisons sont construites par le même promoteur), il y a des règlements de copropriété ou syndicaux à respecter », explique Philippe Jossé, directeur général du logement France chez Bouygues Immobilier.
Si les droits à construire supplémentaires de 30 % contreviennent à ces règles, il faudra alors obtenir l'accord des autres copropriétaires ou habitants. Ceux qui vivent dans des copropriétés savent combien c'est difficile... « Bien sûr, si tout le monde est d'accord, ces règles pourront être modifiées », poursuit Philippe Jossé.

Où se renseigner ?
Inutile de vous précipiter dans votre mairie tout de suite pour savoir où elle en est de la procédure de consultation liée à la nouvelle loi. C'est un peu tôt. En revanche, si vous avez des projets d'extension, vous pouvez dans un premier temps vous renseigner auprès des services d'urbanisme de votre commune pour connaître les règles qui vous sont actuellement applicables et les contraintes qui vous sont d'ores et déjà imposées.« Attention, les documents d'urbanisme sont, quels qu'ils soient, assez difficiles à interpréter, voire carrément abscons. Mieux vaut s'entourer des services d'un professionnel, par exemple un architecte, qui saura les comprendre et les traduire », conseille Bruno Corinti, président de Nexity Immobilier résidentiel.

Le dépôt du permis de construire reste obligatoire

Le nouveau dispositif ne vous dispense pas non plus du traditionnel dépôt du permis de construire et de ses avatars. Une fois l'autorisation de la commune obtenue, vous restez donc tributaire des éventuels recours gracieux (auprès de la mairie qui a délivré le permis) ou contentieux (devant le tribunal administratif) de vos voisins.
MIREILLE WEINBERG " Les Echos"



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